J’ai analyse l’image du paradis sur Google image

Et si on se faisait des idées sur les idées qu’on se fait du Paradis ?

La dernière fois que le Tryangle l’avait visité, le Paradis était le lieu où, dans plusieurs religions, l’âme se rendait après la mort – au milieu des angelots et des nuages, bien sûr. Mais, pour se faire une idée plus précise de l’actualité d’un lieu surnaturel, quoi de mieux que de jeter un oeil sur Google Image ?

Paradise

Voici ce qu’ont obtenu les chercheurs en internetomancie du Tryangle lorsqu’ils ont tapé le mot anglais « paradise » dans le moteur de recherche Google image. Quelle ne fut pas leur surprise… L’esthétique Edenique de l’Ancien Testament a, semble-t-il, cédé la place à un imaginaire d’agence de voyage, quelque part entre le fond d’écran Windows 95 et la peinture du Douanier Rousseau. Le terme paradis, mot d’origine avestique, qui avait traversé le persan, le grec et le latin,  subit ici une mutation de type « phase terminale ». Et, contrairement à l’idée initiale du grec « paradeisos » qui signifiait un parc clos où se trouvent des animaux sauvage, la vision occidentale moderne du paradis se fige sur le bord de mer ouvert, et dans un lieu lointain. Pourquoi ?

Le Tryangle est fier de vous présenter le fruit de 10 ans de recherche de toute son équipe scientifique, une vision synthétique et idiosyncrasique du paradis balnéaire universel conçue à l’aide de programmes graphiques dernier cri :

Analysons un peu cette image : le regard moderne se porte sur un lieu lointain plutôt que « clos et rassurant » comme l’était l’Eden originel. Cette image est une fiction du Voyage, perçue comme antithèse relaxante de la vie urbaine. Pire encore, cette fiction du voyage se fige sur le bord de mer en une véritable tautologie : la finalité de la vie, cet endroit parfait, est aussi un lieu du départ en voyage. La perfection est un rond. Autrement dit, le lieu dont on rêve est un lieu où l’on aura l’impression de glisser en permanence vers l’ailleurs, vers le bleu paradisiaque – et morbide – de la mer. C’est donc un lieu de désir terrestre. Un enfer.

Le sable clair, choisi pour son aspect livide et nuageux ressemble à un lit dans lequel le dormeur pourra se glisser suavement, la mer devenant soudain une couverture. En somme, le rêve moderne est une plage-dortoir, vide d’être humain, symbole codé de la mort lente. Une plage concentrationnaire. Oui, le Tryangle l’affirme : la plage, c’est la mort. En voici, décrypté l’insoupçonnable géométrie du déclin :

Heaven

Pour autant, l’idée de « Paradis » s’est, en anglais, divisée en deux termes : « paradise » – sur lequel le Tryangle vient d’exercer sa sagacité, et « heaven« , aux consonances plus religieuses. Serait-ce le lieu d’un refuge spirituel plus old school ?

Force est de constater (voir ci-contre) que nous retrouvons le lieu clos et le registre rural du paradis originel. Et ce paradis n’est pas exempt d’amitiés animalières. Plus proche de l’esthétique New Age de la peinture évangélique américaine, ces visions du paradis contiennent fréquemment la figure de l’escalier qui reste, malgré l’invention de l’ascenseur et de la navette spatiale, un moyen sportif de faire ses premiers pas dans l’autre monde. On remarquera un retour des nuages et de la lumière blanches, deux constantes des représentations picturales italiennes, tout en pointant du doigt l’apparition de l’arc-en-ciel sans doute due au bon goût des croyants mexicains.

Bien sûr, c’est le retour des anges qui sera le plus important, mais au lieu des anges traditionnels (l’ange Michaël) ou du gardien du paradis (Saint-Pierre), le croyant moderne s’imagine accueilli par un Jésus ailé. Aucun doute possible : habitués à une certaine qualité de service hôtelier, nos chrétiens exigent que ce soit le patron en personne qui vienne leur ouvrir. Et, en vérité je vous le dis, leur première question sera :

– Est-ce que vous avez le wifi ?