Booba vient-il du futur ?

Voire, d’une autre planète ? Dans l’interview qu’il donne à Metro le lundi 26 novembre dernier à l’occasion de la sortie de son album « Futur » , quand on lui demande « Pourquoi le titre « Futur » ? », le rappeur de Boulogne-Billancourt répond que « le concept de l’album, c’est de déclasser la concurrence de manière fulgurante […] au point de me retrouver sur une autre planète. ». Et Booba de surenchérir « C’est à la fois pour dire que je suis en avance et que eux sont en retard, vu que c’est moi qui les renvoie au Moyen-Âge».

De prime abord, on pense à une crise d’ego surdimensionné symptomatique du rap game, d’autant que l’on sait que Booba a reçu cinq disques d’or et trois disques de platine (record en cours), loin devant ses poursuivants. Mais, avec cette réponse, ainsi qu’avec le contenu de son album Futur, ce dernier ne livre-t-il pas d’obscures pistes sur sa véritable origine spatio-temporelle : et si Booba venait vraiment du futur ?

LE FUTUR SELON BOOBA

En expert de la littérature rappistique, le Tryangle se propose d’examiner le contenu des textes de ce dernier album tant attendu. Prenons la chanson « Futur »,  Booba y présente des faits à venir qui résistent fort bien à l’examen politico-économique. En témoigne la punchline « Je baise comme au Qatar, c’est la vie », issue du morceau C’est la vie. Nul n’est censé ignorer que ce pays du Moyen-Orient, ultra-conservateur, opère depuis plusieurs années une ouverture vers l’Occident, certes exclusivement économique. Le rappeur de Boulbi ne fait ainsi que souffler la suite logique des évènements : une ouverture des mœurs pour une bourgeoisie gorgée d’argent, et donc en proie à la luxure. Un exercice de prospective qui met la puce à l’oreille du Tryangle.

Aussi, Booba se pose-t-il en géopoliticien d’anticipation : en proposant le néologisme sémantique « caramel » pour caractériser l ‘argent (« Je dois faire du biff, de la mula, du caramel » dans Caramel), le rappeur dessine également la façon de faire du « biz » dans les années futures, avec une devise nouvelle. Sans doute trop jeune (36 ans) pour assimiler la couleur caramel aux pascals de 500 francs pré-Euro, Booba pourrait user du caramel comme d’une monnaie d’échange dans les milieux illégaux car impossible à tracer. Comme avait pu l’être le sucre sur le marché de l’épice jusqu’au XVIIe siècle. Et Booba d’ajouter, dans la chanson O.G : « Je vois que du vert jaune mauve ». Ici, il ne s’agit pas d’une référence à la couleur des euros brassés en nombre, leitmotiv du rappeur moderne (voir les « couleurs préférées » de Shone dans La Bicrave est dans ma tête) mais bien à la couleur du ciel pollué dans les années à venir, phénomène qui augure des lendemains proche de l’Apocalypse sur Terre.

Poursuivons la démonstration : nantis parmi les nantis suite à sa prise de pouvoir dans le rap game au milieu des noughties, Booba n’aura que faire du sort de la planète bleue. Pourquoi ? Tout simplement parce qu’il aura élu domicile sur la Lune, ici, dans la chanson Kalash :

« Moi et mes kheys on part sur la Lune, amuse-toi bien en Meurthe-et-Moselle »

Ou encore « Je suis sur la Lune, ils sont au Moyen-Âge » dans 1.8.7, attestant la preuve d’hypothétiques bases lunaires créées pour la haute bourgeoisie terrienne. Seul moment durant lequel il daignera se rendre sur Terre dans le futur ? Pour recevoir son ou ses prix aux Victoires de la Musique. Alors que le rappeur a boycotté l’événement en 2011, ce dernier annonce « quinze ans plus tard, aux Victoires de la Musique je suis convié » (Tout ce que j’ai).

BOOBA, SELON LE FUTUR

Mais si Booba vient du futur, comment celui-ci est-il venu à notre époque, dans le passé, nous avertir de tous ces changements ? Le Tryangle a mené l’enquête et identifié une piste plausible dans deux titres de l’artiste :

  • 1.8.7 (« Remonte l’avenue des Champs en DeLorean »)
  • Futur (« Monte dans la DeLo, j’vais dans le futur »).

Cette piste paraît fort logique si l’on regarde de plus près la punchline « Je leur prendrais ce qu’il n’ont pas », une nouvelle fois dans Futur. La preuve irréfutable d’un paradoxe temporel puisque Booba voyage dans le temps pour obtenir des biens avant que la concurrence ne les possède, comme un Biff Tannen, l’ennemi héréditaire de Marty Mc Fly, et son almanach dans Retour vers le Futur 2. Booba serait-il en possession d’un document venu du futur ? Le doute reste entier. Le Tryangle présente ci-dessous une photographie compromettante (à moins qu’il ne s’agisse d’un habile montage) :

Et si certains réfractaires claironnent qu’un voyage dans le temps est impossible pour une entité humaine, qu’en est-il de faire voyager un androïde ? Dans le titre G5 Intro, Booba évoque la possibilité qu’il soit lui-même un robot ayant épousé la forme d’un rappeur mésomorphe : « Machine, c’est plus dur que tu l’imagines. Et même si dure est la matrice… » suivi d’un « Ils me donnent des coups que je ne sens pas », qui renforce l’aspect surhumain du « bonhomme ». Sans oublier les changements de musculature extraordinaires constatés à chaque nouvelle apparition de Booba, qui pourraient étayer la théorie d’une version améliorée du robot dès que la sortie d’un nouvel album est planifiée.

Finalement, Booba ne serait-il pas la transposition française de la prophétie de l’homme-phalène, comme avait pu la présenter John Keel dans son ouvrage Mothman Prophecies en 1975 ? Aperçu dans plusieurs pays (USA, URSS, divers régions d’Asie), l’homme-phalène serait une entité d’une autre planète, ayant l’apparence d’un homme et d’un papillon, venu pour avertir l’Humanité d’une catastrophe imminente. Des albums précédents comme signe annonciateurs d’une prophétie, donc ? Dans Illegal sur l’album 0.9, Booba annonce « bleus sont les gyrophares, rouges sont mes yeux » tandis que dans Repose en paix sur Autopsie Vol. 1, ce dernier « arrive sur toi plus vite que les ragots ». Dans cette même mixtape, le rappeur de Boulbi termine le titre Inédit sur ces rimes :

«Je serais casher si je meurs égorgé. Frères, sortez les seringues de vos artères».

Signes prophétiques d’un avenir noir pour les prolétaires drogués, bétail d’une société en surpopulation et donc anthropophage, à l’instar de Soleil Vert. A ce jour, aucune manifestation officialisée du Mothman en France… Jusqu’au 26 novembre dernier, date de la sortie du Futur de Booba ?

Matthieu Rostac, avec l’aide précieuse de Fred LaBeste