Comment meurt-on d’une overdose de café ?

Ce matin, le Tryangle se penche sur les boissons chaudes consommées au petit-déjeuner. Certains préfèrent leur café noir, ou avec un canard. D’autres se délectent d’herbe en sachet trempée dans un mug fumant. Les plus gourmands se brûlent les doigts contre un bol rempli de chocolat chaud. Ces compagnons matinaux, qui nous permettent de passer en douceur de notre lit douillet à une chaise de bureau peuvent-ils devenir notre pire cauchemar ?

Dans le traité des excitants modernes, Honoré de Balzac nous livre l’aperçu des morts atroces que des prisonniers anglais ont vécu après avoir été soumis à un régime où ils ne pouvaient consommer que l’une de ces trois boissons énergisantes… Méfiez-vous !

« Le gouvernement anglais a permis de disposer de la vie de trois condamnés à mort, auxquels on a donné l’option ou d’être pendus suivant le formule usitée dans ce pays, ou de vivre exclusivement, l’un de thé, l’autre de café, l’autre de chocolat, sans y joindre aucun autre aliment de quelque nature que ce fût, ni boire d’autres liquides. Les drôles ont accepté. Peut-être tout condamné en eut-il fait autant. Comme chaque aliment offrait plus ou moins de chances, ils ont tiré le choix au sort.

L’homme qui a vécu de chocolat est mort après huit mois.

L’homme qui a vécu de café a duré deux ans.

L’homme qui a vécu de thé n’a succombé qu’après trois ans.

Je soupçonne la Compagnie des Indes d’avoir sollicité l’expérience dans l’intérêt de son commerce.

L’homme au chocolat est mort dans un effroyable état de pourriture, dévoré par les vers. Ses membres sont tombés un à un, comme ceux de la monarchie espagnole.

L’homme au café est mort brûlé, comme si le feu de Gomorrhe l’eût calciné. On aurait pu en faire de la chaux. On l’a proposé, mais l’expérience a paru contraire à l’immortalité de l’âme.

L’homme au thé est devenu maigre et quasi diaphane, il est mort de consomption, à l’état de lanterne ; on voyait clair à travers son corps ; un philanthrope a pu lire le Times, une lumière ayant été placée derrière le corps. La décence anglaise n’a pas permis un essai plus original.

Je ne puis m’empêcher de faire observer combien il est philanthropique d’utiliser le condamné à mort au lieu de le guillotiner brutalement. On emploie déjà l’adipocire des amphithéâtres à faire de la bougie, nous ne devons pas nous arrêter en si beau chemin. Que les condamnés soient donc livrés aux savants au lieu d’être livrés au bourreau. »

Honoré de Balzac, Traité des excitants modernes, III


Texte complet : http://www.bmlisieux.com/curiosa/excitant.htm